1 - La sublimation à travers un héros, ses acolytes et leurs valeurs

Publié le par Marie S.

Les trois auteurs du corpus relatent un même événement : la bataille des Thermopyles où un groupe d'hommes, les Spartiates, défendent les valeurs de leur cité, Sparte, et leur culture grecque. Ces Spartiates sont dès le début de l'intrigue considérés tels des héros. Ils luttent, en effet, contre un ennemi aux effectifs plus nombreux avec assurance et courage. Ils sont donc héroïques face à une mort certaine. Ils défendent des valeurs nobles. Cette défense des valeurs stimule les faveurs des lecteurs ou spectateurs. Ainsi, les Spartiates soutiennent des valeurs telles que la solidarité entre eux, le courage face à l'ennemi, l'interdiction d'abandonner... Certes la sublimation des trois-cents s'effectue à travers ces valeurs mais aussi et surtout parce qu'ils y croient et s'y tiennent avec fierté. Ils en font leur priorité. Ainsi, en défendant de tels idéaux, ils ont tout de l'image du héros sûr de soi. De même, nous pouvons également les considérer comme des super-héros, tels des justiciers combattant pour leur idéal de liberté. Les trois-cents hoplites possèdent leurs propres attributs dont la cape pourpre -habit distinctif de bon nombre de super-héros-, un casque, des cnémides, une lance de plus de deux mètres de long, une épée et un bouclier rond orné de la onzième lettre de l'alphabet grec Λ, la lettre « lambda », symbole de Sparte. A noter que Miller et Snyder ne font pas porter à leurs personnages la cuirasse traditionnelle mais plutôt une culotte en cuir ou même parfois rien.

Parmi ces hommes sublimés par leur tenue, un en particulier est mis en avant. Il s'agit du roi Léonidas, chef de l'armée. Tout d'abord, dans le roman graphique, la voix-off, parfois confondue à la voix du conteur Dilios, joue un rôle majeur dans la sublimation de Léonidas. En effet, dès sa première apparition, elle déclare : « Lui seul peut faire cesser cela. Lui seul. » Il est donc dès la première ébauche de son visage placé au dessus des autres, comme un être unique. Son nom ne sera cité que tardivement et sera mis en valeur par une calligraphie en majuscule et en couleur qui tranche avec les couleurs sombres de la vignette.


I-1 calligraphie Léonidas

  MILLER Frank (scénario et dessin), Varley Lynn (couleurs). 300. Montreuil : Rakham, 1999. "Honneur", f.10. 2

 

 

Ainsi, un certain mystère plane autour de cet homme. Cela attise la curiosité du lecteur qui a connaissance de sa fonction et de son importance, mais non de son nom. Cette curiosité fait qu'il s'intéresse davantage à ce personnage. De même, lors du premier portrait de Léonidas, le lecteur peut le découvrir dessiné en contre-plongée, procédé qui le place dès le début comme un homme puissant ; son silence semble alors majestueux, digne de respect à la différence des autres vignettes qui l'entourent. A ce sujet, Jean-Marc Lainé déclare que « Les moments de silence sont essentiels chez Miller : l'émotion est plus forte »1. 

 

I-1-1ère apparition Léonidas

MILLER Frank (scénario et dessin), Varley Lynn (couleurs). 300. Montreuil : Rakham, 1999. "Honneur", f.6. 

 

Zack Snyder utilise une autre approche afin de glorifier Léonidas. En effet, le spectateur découvre le roi entraînant son fils devant les yeux de sa femme. L'accent est donc davantage mis sur l'aspect familial. Toutefois, pendant la bataille, Snyder joue également avec l'angle de la caméra avec le procédé de la contre-plongée.

 

 

SNYDER Zack. 300. États-Unis : Warner Bros, 2007. 1:25:59 - 1:29:11.

 

 

 

 

Léonidas se retourne, la caméra effectue un travelling avant passant ainsi d'un plan moyen à un gros plan sur le visage du roi, filmé en contre-plongée. Chaque mouvement de la caméra sublime le personnage. Elle va à la rencontre du héros, le filmant par le bas, elle se rapproche en remontant vers son visage, lui donnant un caractère grandiose, noble. Le mouvement de la caméra sublime également ses paroles, les rendant plus dramatiques et épiques. De même, dans son livre sept de L'enquête, Hérodote sublime Léonidas plus discrètement. L'auteur magnifie le chef en faisant une énumération de ses ancêtres dont Hercule, un héros. Au paragraphe 204, il écrit : « Il comptait parmi ses ancêtres Anaxandrides, Léon, Eurycratides, Anaxandre, Eurycrastes, Polydore, Alcamènes, Téléclus, Archélaüs, Agésilaüs, Doryssus, Léobotes, Echestratus, Agis, Eurysthènes, Aristodémus, Aristimachus, Chéodéus, HyllusHercule.» Léonidas est doncle successeur d'une illustre lignée de rois mais aussi le descendant d'un demi-dieu. De même, la sublimation s'effectue aussi par la place du terme « Hercule » en fin de phrase. Le lecteur retiendra davantage ce terme et sera tenté de le comparer au sujet « il », c'est-à-dire Léonidas. Enfin, dans le roman graphique et dans le film, la sublimation s'effectue aussi à travers les paroles des héros. Un style que nous qualifierons de laconique est utilisé. En effet, les dialogues sont concis, brefs. Le texte prend alors peu de place, mais il est efficace. Dans le film, les paroles sont plus nombreuses afin d'éviter l'ennui du spectateur. Toutefois, la voix-off garde le style de la narration laconique du roman graphique en le reprenant souvent mot pour mot. Face à ce peu de paroles, toute la place est laissée aux dessins et aux mouvements des personnages.

 

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1    Jean-Marc Laine. Frank Miller, urbaine tragédie. Lyon : Les moutons électriques, 2011. (coll. « La bibliothèque des miroirs »). p. 59.

 2  Voir le "Protocole de numérotation des folios". 

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